[Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue

Vous pouvez suivre ici la vie et l'histoire de certaines colonies de fourmis des bloggeurs.
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TheoBriat33
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Bonjour à tous et bienvenue sur ce blog !

Lien vers le Q/R :arrow: https://www.myrmecofourmis.org/forum/vi ... 53&t=31674.

VENDREDI 10 JUILLET 2020

Il est 14 heures, je dois me préparer à aller au travail. En entrant dans ma salle de bain, je remarque une petite fourmi que je pense d'abord être une ouvrière Tetramorium sp., genre très bien représenté par chez moi.
Par curiosité, comme je le fais souvent, je m'approche pour l'observer de plus près.
Surprise ! Thorax imposant, cicatrices alaires, j'ai affaire à une gyne. Vue la taille et l'allure générale, je pense d'abord à une gyne Myrmecina sp., même si je remarque tout de suite sa tête carrée et ses mandibules imposantes.
Comme tout bon myrmécologue qui se respecte, ne sachant pas vraiment à quelle espèce j'ai affaire, je m'empresse de la mettre en tube, de prendre des photos, et de faire une demande d'identification (topic ici : https://www.myrmecofourmis.org/forum/vi ... hp?t=31657).

@Lebenêt apporte alors sa contribution au topic (encore merci à lui), et m'apprend que j'ai affaire au genre Strongylognathus sp. Je ne vais pas mentir, j'ai d'abord cru qu'il s'était endormi sur son clavier. Je n'avais jamais entendu parler, de près ou de loin, de ce genre. Après de plus amples observations, nous en arrivons à la conclusion que j'ai trouvé une gyne Strongylognathus huberi.

Gyne, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Gyne


Il est assez difficile de trouver des informations sur le genre, donné sa rareté. Les informations qui suivent ne sont donc que des fragments que j'ai pu trouver en cherchant sur le web.
Pour faire court, les Strongylognathus sont des parasites des Tetramorium sp. Elles n'ont été que rarement observées, et encore plus rarement élevées. Leurs mandibules lisses en "dents de sabre" caractéristiques ne leur permettent pas de s'occuper de leur propre couvain (que ce soit la gyne ou les ouvrières). Selon l'espèce, elles s'infiltrent alors dans une colonie de Tetramorium sp., dans laquelle elles passeront inaperçu. La gyne parasite pond et produit des phéromones inhibitant la production de séxués chez la gyne parasitée. Les Tetramorium sp. s'occupent alors du couvain des Strongylognathus sans s'en apercevoir, et les seuls séxués produits proviendront de la colonie parasite.
Les Strongylognathus huberi sont quant à elles des esclavagistes, elles organisent des "raids" réguliers sur des nids de Tetramorium sp. afin d'en voler le couvain et de le rapporter dans leur nid, de façon à toujours avoir une population d'esclave importante, qui pourra s'occuper de leur couvain.

SAMEDI 11 JUILLET 2020

Le plan est le suivant : récolter des nymphes et quelques ouvrières Tetramorium sp. et les placer en tube. Lors de l'apparition du premier imago, je retirerai les ouvrières capturées et les "rendrai" à leur colonie mère. Je placerai alors le jeune imago et le couvain avec la gyne.

J'ai pu récolter une trentaine de nymphes dans le premier nid, et j'ai choisi de ne prélever que deux ouvrières. J'ai également réitéré le prélèvement au sein d'un second nid, dans lequel j'ai récolté une vingtaine de nymphes et quatre ouvrières.

Nymphes et ouvrières Tetramorium sp., [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Nymphes et ouvrières Tetramorium sp.


J'ai choisi de prélever sur deux nids différents pour deux raisons :
1) Cela minimise l'impact du prélèvement sur chaque colonie, et leur permet de s'en remettre plus rapidement.
2) La redondance. Cela me donne de meilleures chances quant au succès de l'expérience. Les nymphes du premier prélèvement sont plus "avancées" et donc arriveront plus vite à terme : les esclaves arriveront donc plus rapidement. Si toutefois, pour une raison quelconque, comme cela s'est passé lors de mon expérience avec les Lasius parasites (je dois mettre à jour le blog concerné), les ouvrières du premier prélèvement décident de ne pas s'occuper du couvain, celles du second prendront le relais jusqu'à l'apparition des esclaves.

Si tout se passe bien, je pense pouvoir introduire les premiers esclaves d'ici Lundi ou Mardi.

DIMANCHE 12 JUILLET 2020

Lors du nourrissage, la gyne ne semble pas intéressée par le pseudo-miellat. Elle reste sur le coton de sortie et ne bouge pas.
Je me rends alors compte qu'elle s'est en fait "emmêlée" dans une fibre du coton de sortie.
Après une intervention chirurgicale digne de Greys Anatomy, la dame est libre. Elle a toujours une fibre de coton autour du pétiole, que je n'arrive pas à enlever, mais cela ne semble pas l'embêter. J'aime à penser qu'elle le voit comme un accessoire de mode. J'ai enfin trouvé en quel animal Karl Lagerfeld s'est reconverti.

Du côté des nymphes, pas de changement, j'attends toujours avec impatience l'apparition du premier imago.

Merci à tous de m'avoir lu, et si vous avez des questions, conseils ou commentaires, n'hésitez pas à m'en faire part sur le Q/R :arrow: https://www.myrmecofourmis.org/forum/vi ... 53&t=31674.

*merci*
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LUNDI 13 JUILLET 2020

MESDAMES, MESDEMOISELLES, MESSIEURS !
Je suis très heureux de mettre à jour ce blog, afin de vous communiquer d'excellentes nouvelles en cette douce matinée d'été.

Le premier imago est né hier soir, vers 21h00. Je regardais ma série et jetais un coup d’œil aux deux tubes contenant nymphes et ouvrières entre chaque épisode. À ma grande surprise, cette dernière provient du deuxième prélèvement, au sein duquel j'estimais les nymphes moins "avancées". La nymphe était simplement cachée sous les autres, et, avec l'aide des ouvrières capturées, elle est peu à peu venue à la vie.

J'aimerais marquer ici un temps mort afin de faire part d'une observation que j'ai pu retrouver à la fois lors de cette expérience, mais également lors de ma tentative avec une Lasius parasite. Je ne sais pas vraiment si cela peut s'appliquer à d'autres cas de figures, ou si j'ai juste été malchanceux, mais j'ai remarqué la chose suivante : il semblerait que, pour que l'apparition du premier imago se fasse dans les meilleures conditions, il faut un ratio d'environ 1 ouvrière pour 5 cocons/nymphes. Dans mon cas, si le nombre de cocons par ouvrières est trop important, elles ne s'en occupent pas et semblent complètement dépassées. C'était le cas avec ma Lasius parasite ; j'avais récolté une quarantaine de cocons et seulement 2 ouvrières. Ce fut également le cas dans le tube du premier prélèvement de cette expérience, avec 2 ouvrières pour 30/40 nymphes. Les ouvrières courent partout, essaient de s'occuper d'un cocon/nymphe, ne finissent pas, puis courent vers un autre, et ainsi de suite, sans que jamais le cocon ne soit ouvert. Encore une fois, il s'agit d'observations personnelles qui peut-être ne sont pas applicables à d'autres cas de figure, mais j'aime à penser que j'apporte ma pierre à l'édifice pour ceux qui souhaitent se lancer dans ce type d'élevage pas franchement facile, pour lequel il est difficile de trouver des informations et des retours d'expérience.


Revenons-en si vous le voulez bien à nos Strongo... Strongylu... Strongat... Revenons-en à nos esclavagistes.
Dès lors que la nouvelle imago s'est mise à bouger d'elle-même, je l'ai séparée des anciennes ouvrières, que j'ai rendues à leur colonie mère. Même chose pour les ouvrières du premier tube (premier prélèvement).
Et c'est à ce moment là que les nouvelles péripéties interviennent.
Je ne savais pas vraiment comment effectuer le transfert. Cela vient surtout du fait que je me monte la tête avec des choses que je ne comprends absolument pas, et des concepts purement inconnus à l'Homme. Je parle des phéromones et différentes "odeurs", que les fourmis et autres êtres vivants utilisent pour se repérer, se reconnaître, et plus généralement communiquer, auxquels nous autres humains sommes complètement étrangers.
De plus, j'ai affaire à une espèce qui, à ma connaissance, n'a jamais été élevée, et n'a été observée qu'une dizaine de fois dans le monde depuis la fin du XIXème siècle (rapport très intéressant de Antarea en 2018, lien disponible dans le Q/R :arrow: https://www.myrmecofourmis.org/forum/vi ... 53&t=31674). Inutile de dire donc que je ne prends pas l'expérience à la légère.

Je ne savais pas s'il était plus judicieux :
1) d'introduire la gyne dans le tube où l'imago est né, où "l'odeur" de la colonie mère n°2 est déjà présente ;
2) d'introduire le couvain, maintenant constitué d'une cinquantaine de nymphes, et l'imago, dans le tube de la gyne ;
3) d'introduire tout le monde dans un nouveau tube "neutre".

En bon pragmatique que je suis (rire ici), j'ai donc décidé de tenter la première option : la gyne n'était pas d'accord, elle n'a pas porté attention une seule seconde au couvain ou à l'imago, et tentait désespérément de sortir du tube.

Après une petite heure sans changement, je me suis décidé à tenter la deuxième option, malgré les risques que cela comporte (stress) : même chose, en pire ! La gyne courrait partout, piétinait le couvain et l'imago encore à moitié endormi.

Une heure de ce calvaire visuel m'a rendu un poil (lire "très") sceptique quant à l'issue de l'expérience.
J'ai alors tenté le tout pour le tout et ai transféré la gyne, le couvain et l'imago dans un nouveau tube "neutre".
Le comportement de la gyne change alors du tout au tout, et elle semble découvrir le couvain et l'imago. Quelques coups d'antennes avec cette dernière, mais aucune agressivité. Elle se positionne alors sur le couvain et se calme.

Pour résumer, il semblerait qu'un tube "olfactivement" neutre soit la meilleure solution dans ce cas de figure.

En me réveillant ce matin, je m'en vais vérifier que tout le monde a passé la nuit. La gyne est en train d'interagir avec une des larves (prélevées par erreur en même temps que les nymphes). Je ne sais pas vraiment ce qu'elle fait, mais il semblerait qu'elle est en train de la lécher. La petite taille de la gyne (3/4 mm) rend les observations difficiles. Directement à sa droite se trouve l'imago, qui s'occupe des larves et nymphes, et vient régulièrement au contact sa nouvelle reine. Frottage d'antennes, toilettage... Je pense pouvoir dire que l'étape de l'intégration est RÉUSSIE ! :slap:


Reste à espérer que la fondation continue dans sa lancée. Rien n'est gagné, mais c'est une étape importante et décisive qui est franchie. Cela pourrait prendre beaucoup de temps, mais croisons les doigts pour une ponte de la gyne dans un futur relativement proche. *amen*

Je termine ce post avec quelques photos (médiocres) de la nouvelle fondation. Nous remarquerons la gyne sur la gauche des photos, et l'imago encore clair sur sa droite, qui s'occupe du couvain de sa gyne :

Fondation 1, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Fondation 1
Fondation 2, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
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MARDI 14 JUILLET 2020

En ce jour de fête nationale (bonne fête nationale à tous), la gyne a décidé de faire bande à part et s'est isolée de son esclave, sur le coton de sortie du tube.
Je dois avouer que cela m'inquiète un peu, et je ne sais pas vraiment quoi faire. J'ai lu il y a quelques mois sur un forum anglophone qu'un éleveur avait rencontré ce même problème avec une gyne Formica sp. et qu'il avait réussi à le résoudre d'une manière aussi simple que surprenante : il forçait la gyne à entrer en contact avec l'imago et le couvain, en la poussant avec un coton-tige.
Ne voulant pas en venir à un tel "extrême", je me dis alors que je vais tout simplement réduire l'espace disponible dans le tube (en enfonçant le coton un peu plus), ce qui aura pour effet de forcer la gyne à rester en contact avec son esclave et le couvain.
J'enlève le coton de sortie, afin d'en dégager la gyne. Rebelote ! Elle s'est à nouveau emmêlée dans une des fibres... :mur:
Je lui dis alors ses quatre vérités et l'informe que, si elle continue dans sa lancée, "papa va se fâcher !".
Je parviens à la dégager du coton de sortie et, dès lors qu'elle est libre, elle court vers le couvain et son esclave et s'y installe (je suppose) confortablement.
Mon inquiétude s'évapore peu à peu, mais le fait qu'elle n'arrête pas de s'emmêler dans le coton m'embête. Elle ne semble pas avoir de problème avec le coton au fond du tube, logique me direz-vous puisqu'il est humide.
En remplacement du coton de sortie, j'ai décidé d'utiliser un petit bouchon en liège (reçu avec les tubes), que j'ai percé en son milieu. J'ai ensuite rempli le petit trou de coton pour permettre l'aération et éviter toute évasion. Certes, il y a encore du coton, mais pas suffisamment pour que la gyne s'y emmêle.

JEUDI 16 JUILLET 2020

Deux esclaves supplémentaires sont nés : un hier, et un autre aujourd'hui. C'est une très bonne nouvelle, d'une part parce que plus y a d'esclaves, plus les chances de réussite de l'expérience augmentent, mais aussi parce que cela veut dire que les esclaves font leur boulot et s'occupent du couvain.
Il y a plusieurs nymphes bien foncées, qui devraient donner une bonne poignée d'esclaves supplémentaires d'ici la fin de la semaine.
Je me rends cependant compte que les esclaves issus du premier prélèvement sont nettement plus grands (4 mm contre 2,5/3 mm), et ont une coloration différente (brun, virant vers le jaune foncé sur l'abdomen ; similaire à Aphaenogaster subterranea) de ceux issus du second prélèvement (brun foncé, presque noir).
Je pense donc avoir affaire à deux espèces de Tetramorium différentes, ce qui n'est pas étonnant, donné l'abondance du genre dans le coin. Qui plus est, et je cite le forum (fiche d'élevage de T. caespitum) : "le groupe Tetramorium caespitum/impurum est actuellement en révision majeure sur la base d'analyses génétiques. Il est possible dans le futur que ce groupe soit scindé en un nombre d'espèces plus important."
Aucun souci cependant concernant la cohabitation au sein de la fondation. Les esclaves et la gyne se comportent comme s'ils provenaient d'une seule et même colonie.
La gyne se porte bien, et ne s'aventure plus très loin du couvain. Elle est très calme, au même titre que les esclaves, avec qui les échanges sont limités, mais réguliers. L'intégration ne pose donc plus question ! :slap:

J'ai parfois du mal à distinguer la gyne de l'ouvrière la plus grande au premier coup d’œil, parce qu'elles font la même taille et ont des morphologies similaires. La différence majeure se situe au niveau du thorax, beaucoup plus proéminent chez la gyne.

J'aimerais finir ce billet sur un signe encourageant. Ce matin, j'ai pu à plusieurs reprises (et ce pendant une observation de cinq minutes tout au plus) remarquer la gyne se "lécher" l'abdomen, qui peut parfois être le signe d'une ponte imminente. Croisons les doigts pour que cela ne soit pas qu'un faux espoir ! *amen*

Merci à tous de m'avoir lu, et n'hésitez pas à réagir sur le Q/R :arrow: https://www.myrmecofourmis.org/forum/vi ... 53&t=31674.
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DIMANCHE 19 JUILLET 2020

Plusieurs esclaves sont nés, j'en compte maintenant huit.
La gyne est plus que jamais intégrée. Elle passe la totalité de son temps au milieu du couvain et de ses esclaves.
Je n'ai pas remarqué d’œufs récemment pondus, ceci dit le tube est assez sale et, donnée la taille de la gyne, j'imagine qu'ils sont de très petite taille. J'aurais donc très bien pu les manquer.

J'ai sorti mon appareil photo cet après-midi pour faire quelques clichés de gynes Lasius emarginatus ramassées ces derniers jours. J'en ai donc profité pour faire quelques photos de la gyne Strongylognathus huberi et de ses esclaves.

Photo 1 : la gyne se trouve sur la droite de l'image, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Photo 1 : la gyne se trouve sur la droite de l'image
Photo 2 : on notera chez la gyne, située au même endroit que sur l'image précédente, les belles mandibules "en dent de sabre", [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Photo 2 : on notera chez la gyne, située au même endroit que sur l'image précédente, les belles mandibules "en dent de sabre"

Photo 3 : la gyne est sur la droite, sur le couvain, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Photo 3 : la gyne est sur la droite, sur le couvain
Photo 4 : trouvez la gyne !, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Photo 4 : trouvez la gyne !


Distinguer la gyne des ouvrières est, comme vous pouvez le voir, assez compliqué.

J'espère que ces photos auront su nourrir votre curiosité.

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LUNDI 27 JUILLET 2020

Il est temps de poster un nouveau billet, même si je ne remarque pas beaucoup de changement par rapport au dernier. Certes, plusieurs esclaves sont nés, et même s'il devient difficile de les compter, j'en dénombre désormais 17.
La gyne est toujours au milieu du couvain, à communiquer avec ses esclaves, et elle semble se porter parfaitement bien.

Je sors mon appareil photo pour poster quelques clichés avec le billet. Et oui, n'ayant pas grand chose à dire, il est toujours utile de meubler le post avec quelques photos... *oups*
Vient l'heure de la retouche des images, histoire de les rendre un peu plus acceptables. J'affiche la photo en grand sur mon ordinateur, et je zoome un peu...
SURPRISE, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
SURPRISE

Ce que vous pouvez voir sur cette photo, bien que médiocre, à la pointe de la flèche rouge, c'est UNE GRAPPE D'OEUFS.
La gyne a donc pondu ! Je suis aux anges, et, même si au final je n'ai affaire qu'à une petite grappe d’œufs et que rien n'est gagné, je suis empli d'espoir.
Bien que je n'ai aucun mérite dans ce qui se passe, je ne peux m'empêcher de ressentir un brin de fierté. J'admets que c'est très égocentrique puisque, peut-être à votre plus grande surprise, ce n'est pas moi qui ai pondu les œufs ; et à part patienter et observer, je n'ai pas fait grand chose.

Toujours est-il que du chemin a été parcouru depuis la capture dans ma salle de bain. Après l'identification qui ne fût pas facile (merci encore à @Lebenêt sans qui cette aventure n'aurait sans doute pas vu le jour), la capture des esclaves, les péripéties de la gyne et sa fibre de coton, et l'intégration, c'est l'étape de la ponte qui est franchie.

Si ce n'est pas là un parfait exemple du rêve américain, une masterclass de l'escalade de l'échelle sociale pour cette belle gyne Strongylognathus huberi ! Passer d'un boulot payé au SMIC, à nettoyer des salles de bains, à un statut de reine, entourée d'esclaves aux petits soins ; c'est beau ! XD

Je finirai ce billet avec quelques photos supplémentaires, sur lesquelles vous pourrez apercevoir les esclaves, la gyne et ses œufs (avec un œil entraîné).

Gyne, esclaves et couvain, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Gyne, esclaves et couvain
La gyne se trouve au centre-gauche de l'image, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
La gyne se trouve au centre-gauche de l'image


Merci à tous de m'avoir lu, j'attends vos commentaires et questions sur le Q/R :arrow: https://www.myrmecofourmis.org/forum/vi ... 53&t=31674.
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Re: [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue

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Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans un nouveau billet.

SAMEDI 1 AOÛT 2020

Je compte 18 esclaves. De ce côté là, pas de gros changement depuis le dernier billet.
La petite fondation est de plus en plus téméraire, et agressive.

Gyne S. huberi (gauche de l'image), esclaves et couvain., [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Gyne S. huberi (gauche de l'image), esclaves et couvain.


En parallèle, j'élève plusieurs fondations de Tetramorium sp., qui ont un comportement radicalement différent, même à nombre d'ouvrières égal.

Chez les Tetramorium sp., le nourrissage en tube ne pose aucun souci. Lorsque j'ouvre le tube, elles reculent auprès de leur gyne, et protègent le couvain.

Dans cette fondation de S. huberi, le nourrissage en tube est beaucoup plus compliqué. Deux ou trois esclaves sont en permanence "postés" sur le coton de sortie. Ils sont très agressifs : dès l'ouverture du tube, ils se précipitent vers la sortie, repèrent le coin, puis retournent recruter d'autres esclaves. C'est là que les ennuis commencent vraiment puisqu'ils se jettent littéralement sur tout ce qu'ils trouvent à la sortie du tube (souvent, mon doigt, et faire lâcher une Tetramorium énervée n'est pas facile), quitte à se jeter dans le vide ! XD

Autre phénomène intéressant, il semblerait que les esclaves les plus grands (je suppose d'une espèce de Tetramorium différente) sont ceux faisant office de "garde du corps" de la fondation. Ce sont eux qui sont postés sur le coton ce sortie, et ce sont eux qui se montrent mandibules ouvertes à l'entrée du tube. Cela me fait un peu penser au rôle des major de certaines espèces, comme chez les Camponotus vagus par exemple.
Les esclaves plus petits quant à eux restent en retrait, s'occupent de la gyne et du couvain, et ne sortent que si l'alerte générale est sonnée.

Bref, me rendant compte que le nourrissage en tube impliquait de plus en plus de contraintes et de risques, j'ai décidé d'offrir à la fondation une petite ADC en boîte de coton-tiges.
Le nombre d'ouvrières en permanence dans l'ADC est assez impressionnant (proportionnellement à la taille de la colonie bien sûr). Il y en a toujours au moins 4 ou 5 en repérage, à la recherche de je ne sais trop quoi.

N'ayant pas d'anti-évasion à proprement parler, et ayant réalisé que les Tetramorium sp. pouvaient marcher sur l'huile de noix de coco (que j'utilise habituellement et qui fonctionne bien) sans aucun souci, j'ai décidé d'essayer l'huile d'olive.
Bonne surprise, elles n'essaient même pas de marcher dessus, elles doivent détester l'odeur ! :mrgreen:

J'aperçois toujours la gyne, ainsi que la grappe d’œufs, qui ne semble pas avoir évolué beaucoup. Ceci dit, je n'ai aucune idée du temps de développement du couvain chez Strongylognathus huberi. Ce serait une information intéressante à avoir. Si vous l'avez, je vous attend dans le Q/R :arrow: https://www.myrmecofourmis.org/forum/vi ... 53&t=31674.

DIMANCHE 2 AOÛT 2020

Il ne reste que cinq nymphes. Le temps de fournir à la gyne S. huberi une autre génération d'esclaves est donc venu.

J'ai bien quelques fondations de Tetramorium sp., mais la quantité de couvain est loin de permettre un quelconque prélèvement sans créer de sérieuses conséquences sur le développement de ces dernières. J'ai donc opté pour un prélèvement in natura.

J'ai trouvé une quinzaine de larves, et une dizaine de nymphes, ce qui devrait occuper la fondation pour un petit mois, et donner autant d'esclaves.

J'ai déposé le couvain dans la nouvelle ADC, et ai observé le comportement des fourrageuses. Quelques coups d'antennes, et une incompréhension totale s'installe chez les esclaves. Ils semblent complètement perdus, comme s'ils venaient de découvrir une technologie extra-terrestre qu'ils n'ont aucune idée de comment utiliser. Chaque esclave présent dans l'ADC s'attarde quelques secondes sur une larve ou une nymphe, puis passe à la suivante, sans en faire quoi que ce soit.

Esclave Tetramorium sp. découvrant une nymphe déposée dans l'ADC., [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Esclave Tetramorium sp. découvrant une nymphe déposée dans l'ADC.


Cela a duré au moins une heure. Ils empruntaient exactement les mêmes routes, et allaient toujours voir les mêmes larves. J'avoue avoir esquissé un sourire tant la situation était grotesque.

Cette situation m'a cependant permis d'immortaliser le moment où deux esclaves que je suppose d'espèces différentes sont côte-à-côte :

Deux esclaves d'espèces différentes ?, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Deux esclaves d'espèces différentes ?


Y-a-t-il un expert du genre Tetramorium qui peut me dire à quelles espèces j'ai potentiellement affaire ? @Lebenêt peut-être ? XD

Au bout d'un moment, un des esclaves se décide à interrompre cette boucle sans fin et retourne au tube. Sans doute après quelques échanges de phéromones, le renfort arrive. Quatre ouvrières supplémentaires sortent du tube et commencent à ramener des larves auprès de la gyne.

Esclaves Tetramorium sp. ramenant des larves dans le tube., [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
Esclaves Tetramorium sp. ramenant des larves dans le tube.


Le ballet de l'incompréhension se transforme alors en ballet de la compréhension, et les esclaves s'attellent à ramener la prochaine génération dans le tube. Les larves d'abord, puis les nymphes par la suite.

LUNDI 3 AOÛT 2020

Tout le couvain donné la veille est maintenant en sécurité, et choyé par les esclaves.
Un des esclaves est mort noyé dans une goutte d'huile d'olive ayant ruisselé sur le côté de l'ADC. Il y a cependant eu quelques naissances cette nuit puisque je compte au total 20 individus.
La gyne ne sort plus du tout de son coin de tube, et reste en permanence entourée de ses esclaves.

J'ai l'impression que la grappe d’œufs a grossi. Cela pourrait être mon imagination ou juste l'angle d'observation, mais elle semble plus conséquente. Voyez par vous-mêmes :

S. huberi : grappe d'oeufs au 01/08/2020., [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
S. huberi : grappe d'oeufs au 01/08/2020.
S. huberi : grappe d'oeufs au 03/08/2020., [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
S. huberi : grappe d'oeufs au 03/08/2020.


Qu'en pensez-vous ? Dites-le moi dans le Q/R :arrow: https://www.myrmecofourmis.org/forum/vi ... 53&t=31674.

Merci de m'avoir lu, et à bientôt pour un prochain billet.

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Re: [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue

Message non lu par Lebenêt »

Bonjour !

Grâce au généreux don de @TheoBriat33 (que je remercie infiniment), je suis désormais l'heureuse éleveuse de cette fondation. Je tenterai dans la mesure du possible de garder ce blog à jour, bien que ma plume maladroite soit bien pitoyable en regard de l'excellente et dynamique rédaction de leur ancien propriétaire.

21/09/2020

Elles arrivèrent ce lundi. Premier constat : la Poste ayant traité la lettre avec la douceur qu'on lui connaît, et les Tetramorium ayant eu la merveilleuse idée de creuser frénétiquement le coton, le tube a subi une fuite d'eau pendant le transport ; heureusement, une seule esclave l'a payé de sa vie à priori. Cette fuite a rendu le tube crasseux et opaque, mais je fini néanmoins par distinguer la gyne, sensiblement de la même taille que ses esclaves.

Je l'examine à l'objectif macro ; elle est splendide. Néanmoins, un petit détail change la donne : son vertex est concave... Or, c'est le principal élément d'identification permettant de distinguer Strongylognathus testaceus des autres espèces du genre.
Malgré sa couleur particulièrement sombre, il s'agit donc de l'espèce précitée, et non pas de Strongylognathus huberi comme elle avait été identifiée en premier lieu.
(Si un modérateur passe par là, le titre de ce blog est donc à modifier.)

Strongylognathus testaceus n'est pas une esclavagiste comme sa cousine, mais une inquiline ; autrement dit, au lieu de tuer la gyne hôte, la parasite vivra à ses côtés, et les deux espèces cohabiteront au sein de la même colonie.

Afin de reproduire les conditions naturelles de l'espèce, je prévois de faire adopter une gyne de Tetramorium à la fondation.

La fondation, dans son ADC peu garnie, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
La fondation, dans son ADC peu garnie


25/09/2020

Je reçois ce vendredi deux fondations de Tetramorium de chez @Romain26 ; un grand merci à lui !
Parmi elles, une gyne ayant perdu ses ouvrières durant le transport, et qui de surcroît se montre affamée ; mon choix se porte en toute logique sur elle.
Je ne vous détaille pas le processus d'adoption ; j'ai simplement utilisé une fameuse "méthode 2", que nombre d'entre vous connaissent.

Il commence à se faire tard lorsque j'estime le moment venu de placer la grosse Tetramorium à l'entrée du tube de la fondation "parasitée", après que les premières étapes de l'adoption se fussent déroulées à merveille.

Il se forme alors immédiatement un petit attroupement autour d'elle. Les esclaves ouvrent les mandibules et se montrent très aggressives. Je me dis alors que l'adoption est ratée, et me prépare à assister à une exécution publique...
... Mais non. "Quelque chose" semble les retenir d'attaquer. Et puis, soudain... Elles se dispersent, et ne prêtent plus la moindre attention à la gyne, retournant à leurs tâches habituelles. Elles ne semblent tout simplement pas voir cette énorme masse stationnant au beau milieu du tube.

L'adoption, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
L'adoption


(photo prise de nuit au téléphone, évidemment la qualité est affreuse...)

Quant à elle, notre pauvre Tetramorium demeure immobile ; la pauvre a vécu beaucoup de choses en peu de temps. Ses antennes s'agitent follement devant les odeurs inconnues de cette fondation.

26/09/2020

La gyne a été parfaitement acceptée ! Elle se trouve désormais au milieu des esclaves, qui semblent la considérer comme leur propre gyne.

Je ne m'explique toujours pas le soudain désintérêt pour la gyne des esclaves hier. Je me demande si, par ses phéromones, la gyne de Strongylognathus n'aurait pas été indirectement actrice de la scène...

En tout cas, la fondation dispose donc désormais d'une pondeuse "hôte", qui évitera de devoir prélever fréquemment du couvain de Tetramorium dans d'autres colonies.

03/10/2020

À l'heure actuelle, la fondation se porte à merveille !
Le couvain était plus avancé que je ne le pensais, et deux ouvrières de Strongylognathus sont désormais présentes aux côtés de leurs hôtes.
La gyne de Strongylognathus est toujours à proximité directe de la gyne de Tetramorium, bien qu'il ne semble pas y avoir d'interaction physique entre elles.
Un comportement intéressant à propos de notre gyne parasite : lorsqu'une ouvrière hôte s'intéresse à elle, elle s'immobilise totalement. L'esclave s'en "occupe" alors, de la même manière que pour une larve ou une nymphe ; je présume que notre chère inquiline se fait passer pour telle.

Quelques photos d'elle pour finir :

De dos, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
De dos
De profil, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
De profil
De face, [Blog] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue
De face


Je tenterai de photographier les jeunes ouvrières à mandibules sabres, mais elles passent la plupart de leur temps sous leurs esclaves, contre le coton, ce qui ne facilite pas les prises de vue.
En attente du prochain billet, qui verra le jour dès les prochains événements ; je vous remercie de m'avoir lu !

Le Q/R.
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TheoBriat33
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[FIN DE BLOG] Strongylognathus huberi : l'esclavagiste méconnue

Message non lu par TheoBriat33 »

Bonjour à toutes et à tous,

Comme vous avez pu le constater, j'ai fait don de cette merveilleuse fondation à @Lebenêt.
Je n'ai pas de nouvelles à l'heure actuelle (je ne dis pas ça pour lui jeter la pierre, loin de moi l'idée), mais un coup de ménage s'impose sur mon profil, délaissé depuis presque 2 ans.

C'est pourquoi, si l'expérience continue, je laisse le soin à la nouvelle propriétaire de la fondation d'ouvrir un nouveau blog.

Merci à tous de m'avoir suivi dans cette aventure, ce fût un plaisir de partager mes observations avec vous ! *merci*
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